Si 2016 a รฉtรฉ personnellement une annรฉe pleine d’activitรฉs cinรฉmatographiques et crรฉatives avec la sortie de Nettoyeurs de Guerre, la rรฉalisation et l’inauguration du Tramoscope ou encore la crรฉation de la structure de production Les Regardiens, 2016 aura surtout รฉtรฉ une annรฉe pleine de mauvaises nouvelles pour le monde, oรน il nous a semblรฉ plus perdre que gagner ร grandir… On a soudain pris conscience que l’humanitรฉ est faite de pรฉriodes fastes et paisibles et de pรฉriodes dรฉstabilisantes qui provoquent la peur et le repli sur soi, libรจrent des dรฉmons que l’on pensait enfermรฉs dans les livres d’histoire… ย Nous ne savions pas que nous รฉtions en haut de la vague… Il va maintenant falloir apprendre ร surfer pour ne pas se laisser noyer dans la descente, mais au contraire en tirer le maximum d’รฉnergie constructive!
Jolie thรฉorie… Mais en pratique? En pratique, avant de boire la tasse, j’ai eu envie de partir rencontrer ceux qui รฉchouent depuis quelques temps par milliers sur nos cรดtes, non par choix, mais par survie… J’ai eu envie d’entendre de leur propres voix leurs rรฉcits, leurs projets, leurs colรจres aussi. Nonย juste pour tรฉmoigner de leur situation, mais pour bien rรฉaliser ce qui est entrain de leur/nous tomber dessus… et pour tenter ensemble de contrecarrer ร notre รฉchelle les raccourcis faciles et les amalgames bienpensants ร ceย sujet… ย Jโavais envie de faire un projet avec eux, de leur donner une raison de rencontrer les Suisses du coin (et pourquoi pas dโautres gens ailleurs), avec un autre regard que celui de ยซmigrantย ยป.
Mot รด combien terrible par ce quโil sous-entend. En รฉtant migrant, on est seul responsable de son dรฉpart, de la rรฉussite de son exil choisi. On est comme un รฉtudiant qui part faire ses รฉtudes ร lโรฉtranger, ou un travailleur qui รฉmigre parce quโil a une opportunitรฉ professionnelle dans un autre pays. Ce mot inclut la notion de choixย et dโopportunitรฉ, et exclu toute notion de fuite. Ce qui est ร lโopposรฉ de la plupart des situations vรฉcues par les milliers de rรฉfugiรฉs qui arrivent actuellement ร nos frontiรจres et qui fuient guerres, obscurantismes, dictatures.
Mais comme il est plus facile intellectuellement de refouler des gens qui tentent leur chance plutรดt que des gens qui fuient un dangerโฆ on parle de migrantsโฆ
En parallรจle de ces rรฉflexions, le concours de films du courgemรฉtrage qui a lieu annuellement dans le canton de Neuchรขtel et dont le principe est de donner aux รฉquipes inscrites le mรชme lieu de tournage, proposait cette annรฉe le dรฉcor du home bรขlois. Une vieille maison belle รฉpoque de camp dโรฉtรฉ. Une maison vide, dans laquelle je me suis demandรฉ pourquoi il nโy avait pas de rรฉfugiรฉsโฆย (bon, suite ร deux jours de tournage, on comprend que le bรขtiment est bien trop vรฉtuste pour accueillir plusieurs personnes dans des conditions viables). Mais lโidรฉe a fait son chemin et jโai dรฉcidรฉ dโen profiter pour rรฉaliser mon projet dans ce cadre.
La projection du film lors de la soirรฉe du festival serait lโoccasion dโintรฉgrer les rรฉfugiรฉs dans un projet typiquement neuchรขtelois et de parler aux jeunes de la rรฉgion de la situation des ยซย migrantsย ยป quโils croisent quotidiennement ร la gare. Une belle opportunitรฉ รฉgalement de faire se rencontrer tout ce petit monde grรขce au Cinรฉmaโฆ
En novembre 2016, jโai donc inscrit Les Regardiens au courgemรฉtrage et jโai contactรฉ le service des migrationsโฆ